Ferroutage en France : avancées et perspectives pour le transport routier

170 millions d’euros injectés, une ambition affichée de doubler la part du fret ferroviaire d’ici 2030, et pourtant, en France, la route garde la mainmise écrasante sur le transport de marchandises. Le rail, lui, plafonne à 9 %, loin des standards européens.Les logisticiens se débattent avec des obstacles bien réels : contraintes techniques, défis économiques, inerties organisationnelles. Même les lignes expérimentales, remises sur les rails à coups de subventions, peinent à prouver leur rentabilité. Pourtant, depuis peu, des signaux positifs émergent. Projets pilotes, mesures incitatives, volonté politique renouvelée : le secteur du ferroutage veut sortir de l’ombre et s’invite à nouveau dans le débat sur la logistique française.

Pourquoi le ferroutage revient sur le devant de la scène en France

Impossible d’ignorer la pression environnementale qui monte. Entre le Green Deal européen et la loi d’orientation des mobilités, l’État français se voit poussé à réinventer son modèle logistique. Le ferroutage, cette articulation fine du transport routier et du fret ferroviaire, s’affiche à nouveau comme une réponse pragmatique pour alléger le bilan carbone du secteur. Concrètement, des camions chargés sur des trains : le transport combiné, c’est l’incarnation même du report modal route-rail réclamé par la Commission Européenne.

Les chiffres sont sans appel : en dix ans, le trafic routier a grimpé, tandis que le fret SNCF stagne. Pourtant, avec l’un des réseaux ferroviaires les plus denses d’Europe, la France n’exploite qu’une fraction de son potentiel pour le fret. Face à ce paradoxe, l’État débloque des milliards pour relancer un outil jugé stratégique. L’objectif est clair : faire passer la part du fret ferroviaire à 18 % du transport de marchandises à l’horizon 2030.

La politique de report modal prend désormais corps, bien au-delà du simple affichage. Réouverture de lignes, modernisation des terminaux, soutien aux projets d’autoroute ferroviaire : la feuille de route s’étoffe. Les opérateurs privés, eux aussi, accélèrent, portés par un appui public solide qui vise à rendre le mode route-rail plus compétitif. Cette dynamique s’inscrit dans un contexte européen exigeant. Chaque initiative, chaque euro investi, répond à la stratégie globale de la Commission Européenne, qui conditionne ses financements à la modernisation du fret ferroviaire sur tout le continent.

Quels freins ralentissent encore le développement du fret ferroviaire ?

Pour autant, le fret ferroviaire n’a pas encore réussi à s’imposer face à la route. Plusieurs obstacles majeurs entravent le mouvement, malgré les ambitions affichées par le gouvernement français et la Commission Européenne. Premier verrou : le coût du transport. Le rail souffre d’un système tarifaire rigide et de surcoûts liés au transbordement. Déplacer des marchandises entre route et rail reste plus complexe, et plus cher, qu’un simple transfert routier.

Deuxième point noir : la fiabilité. Pour les chargeurs, retards, suppressions de sillons ou problèmes de ponctualité demeurent un casse-tête. Le réseau ferroviaire, dense mais vieillissant, subit une saturation chronique sur certains axes. Les nécessaires travaux de rénovation génèrent des interruptions qui pénalisent les opérateurs de fret. Enfin, la fragmentation du marché complique la donne. Entre SNCF historique, nouveaux entrants et offres dispersées, les industriels peinent à trouver un interlocuteur unique, capable d’assurer un acheminement fluide sur la longue distance.

Voici, de façon concrète, les principaux blocages qui freinent le développement du ferroutage :

  • Déficit de compétitivité face à la route
  • Retards et manque de fiabilité des sillons ferroviaires
  • Fragmentation du marché et multiplicité des acteurs
  • Tarification inadaptée et surcoût du transbordement

Dans ce contexte, le ferroutage promet beaucoup mais se heurte encore aux réalités du terrain. Les annonces d’investissements massifs rassurent, certes, mais rien ne changera sans une volonté continue de lever ces obstacles. C’est à ce prix que le rail pourra enfin sortir de sa marginalité dans le transport de marchandises.

Des innovations et projets qui changent la donne pour la logistique

La logistique française connaît une transformation rapide grâce à de nouvelles solutions techniques et à l’essor du transport combiné. La digitalisation s’impose, avec l’arrivée progressive de l’e-CMR et la mise en œuvre du règlement (UE) 2025/258. Résultat : la gestion documentaire s’allège, les délais se réduisent, et la circulation des données entre rail et route devient plus fluide. Sous la pression du e-commerce et d’exigences de rapidité, les entreprises investissent dans de nouveaux terminaux rail/route capables de charger des camions entiers sur des trains.

La capacité à manipuler efficacement conteneurs et caisses mobiles devient un enjeu central. Des groupes comme Fret SNCF multiplient les essais sur les corridors TEN-T afin d’améliorer la qualité de service, d’étendre les horaires et de garantir la ponctualité sur les axes stratégiques. Ces efforts, soutenus par l’aide financière de la Commission Européenne, visent à rendre le ferroutage plus attractif et mieux armé face à la concurrence du tout-camion.

Des projets pilotes émergent, et la France accélère le développement des autoroutes ferroviaires. Sur l’axe France-Italie, ou encore du côté de l’Atlantique, ces initiatives entendent transférer massivement le transport de marchandises de la route vers le rail, avec à la clé une forte réduction des émissions de gaz à effet de serre. La création d’un réseau de transport combiné ferroutage performant répond non seulement à la demande écologique, mais aussi à la nécessité de bâtir une logistique plus robuste.

Jeune femme professionnelle analysant une carte digitale

Le ferroutage, un pilier d’avenir pour un transport plus durable

Peu à peu, le ferroutage s’impose comme une solution concrète pour avancer vers un transport de marchandises à faible émission carbone. Face aux exigences européennes du Green Deal et de la Commission Européenne, la France accélère le report modal route-rail. Même les chargeurs longtemps hésitants se laissent convaincre, séduits par la sécurité, la régularité et la promesse d’une baisse des gaz à effet de serre offerte par l’autoroute ferroviaire.

Vers une logistique verte et compétitive

Voici quelques apports tangibles du ferroutage pour la logistique :

  • Moins d’émissions : le train rejette jusqu’à neuf fois moins de CO₂ par tonne transportée que le camion.
  • Capacité accrue : un convoi ferroviaire équivaut à cinquante camions, ce qui allège la circulation sur les grands axes.
  • Fiabilité renforcée : avec la régularité soutenue par SNCF Réseau, la ponctualité devient un argument de poids pour les entreprises.

La multiplication des autoroutes ferroviaires, appuyée par des fonds européens, simplifie le transport de camions entiers par train sur de longues distances. Les transporteurs routiers s’adaptent, faisant évoluer leur modèle pour intégrer le transport combiné. La logistique verte s’organise, portée par le double impératif de souveraineté industrielle et de responsabilité environnementale, deux attentes désormais partagées par les clients comme par les citoyens. La France a planté les graines d’une mobilité marchande plus responsable ; reste à voir jusqu’où le rail saura pousser ses avantages face à la route.

Articles populaires